Pourquoi ce malaise

Vécu un samedi: Je passe l’après-midi avec une amie et pendant qu’elle s’absente quelques minutes, une dame âgée qui se trouve à la table d’en face avec ses deux amies, plus jeunes, me fait signe de venir. Je ne comprends pas trop, au départ, car j’étais dans mes pensées… Je vois ensuite qu’elle me fait ce signe, en s’adressant à moi dans une langue européenne que je ne comprends pas, en montrant son smartphone. Je comprends donc qu’elle me demande de les prendre en photo. Alors que je lui demande, en anglais, si elle veut que je les prenne en photo. Ses amies semblent lui demander d’arrêter. Le visage de la dame se décompose et je suppose qu’on lui a fait remarquer que je suis en fauteuil roulant. Elle ne l’avait pas vu. Elle s’excuse.
Je porte mon masque, je me rapproche d’elles et je propose de les prendre en photo. Elles sont mal à l’aise, la plus âgée a très envie que je prenne cette photo, mais n’ose accepter. C’est donc à elle que je décide d’adresser ma proposition, une dernière fois. Elle accepte avec plaisir, toujours dans la langue que je ne comprends pas 🙂 , je prends la photo, elles semblent satisfaites et je retourne à ma table (ne pas oublier de préciser que je me désinfecte les mains). Le malaise semble avoir disparu 😉
En fait, je n’ai rien trouvé d’étrange à ce qu’elle me demande de les prendre en photo. Comme beaucoup d’hommes et femmes, qui ont des déficiences, je ne vis pas en me disant que j’ai une déficience, de même qu’on ne vit pas en se disant, tous les jours, que nous sommes un homme ou une femme, roux (rousse), brun(e), noir(e), blond(e) etc. (vous saisissez l’idée)… C’est lorsque j’ai vu l’intervention des amies de cette dame (qui a créé le malaise de nous toutes), que je me suis « vue », à ce moment-là, comme déficiente, extraordinaire et handicapée en tout. Mais parce que samedi, était un « bon jour », j’ai pu faire le choix de refuser ce poids et ces étiquettes posés sur moi sans le vouloir. Mais tous les jours ne sont pas vécus comme « bons », alors ces étiquettes et poids, sans volonté de blesser, se posent et il devient parfois compliqué de les enlever.
Notre société peu inclusive est responsable de ces malaises et mal-être. L’une des manières pour changer cela est de rendre nos lieux publics accessibles et permettre ainsi les rencontres naturelles.
Prenez soin de vous, qu’aucune étiquette non souhaitée ne se pose sur vous 😎
Petit Cyborg