Etre visible pour rendre accessible

Cette semaine, je suis tombée sur un épisode de Blow up, sur Arte, dont le thème était « Le handicap au cinéma » . J’étais vraiment curieuse de ce que j’allais y découvrir.

Cela fait quelque années que je suis convaincue qu’être visible est l’un des éléments qui pourraient d’une part faire en sorte que les lieux publics soient rendus accessibles, parce que cela permet de savoir pour qui on le fait. D’autre part, cela participe à faire en sorte qu’on ne s’étonne plus de voir des hommes et femmes ayant des déficiences dans nos rues, nos cafés, restaurants, boîtes de nuits… bref, partout, circulant librement.

J’ai été surprise de découvrir, dans ce Blow up, qu’il existe quand-même pas mal de films qui touchent au handicap. Sans surprise, dans la plupart de ceux-ci, les personnes ayant des déficiences semblent être les personnages centraux. C’est normal, étant donné qu’il s’agit souvent  d’une mise en lumière de certains sujets et de personnages ayant existé ou existants encore. Je pense que cela contribue certainement à sortir de l’inconnu les diverses situations de handicap, mais pas tellement à nous habituer à la vue de personnes ayant des déficiences.

Je m’explique… je pense que si dans des films et séries qui ne traitent pas du thème du handicap nous voyions plus souvent des personnages secondaires ou figurants en fauteuil roulant ou présentant d’autres types de déficiences, cela ferait en sorte que nous ayons l’habitude d’y être exposés. Cela pourrait contribuer à atténuer le malaise, parfois présent, lorsqu’on rencontre des gens en fauteuil roulant, par exemple. Je pense que cela contribuerait à faire en sorte de percevoir comme normales, les déficiences.

Avoir une déficience n’est, à mon sens, pas hors norme, nous ne sommes juste pas habitué(e)s à les croiser, parce que nos villes ne le permettent pas. Il y a une différence entre vivre avec une maladie et vivre avec une déficience. La déficience est souvent la conséquence de la maladie, il s’agit d’une insuffisance ou d’une faiblesse. On peut donc avoir une déficience et n’avoir aucune maladie. On peut avoir une déficience suite à une maladie, mais il est assez dur de rester un ou une malade toute sa vie, c’est un mal à éliminer du corps, lorsque cela est possible. En revanche, vivre confortablement toute sa vie avec une déficience est faisable à condition que l’environnement soit adapté à celle-ci. Je pense qu’il est essentiel de faire une distinction entre maladie, déficience et handicap. Le handicap est lui, causé par une société qui ne tient pas compte de toutes les différences.

Nous sommes tous différents, les personnes en situations de handicap, ne sont pas extraordinaires, elles font partie de la diversité qu’offre la condition d’être humain. De la même manière, qu’à Milan, en tant que belges, nous pouvons présenter des caractéristiques qui font que nous reconnaîtrions et trouverions plus de similitudes avec d’autres belges, qu’avec des italiens, ceux qui ont eu une Syringomyélie et vivent avec les conséquences de cette maladie présenterons plus de caractéristiques physiques similaires à d’autres ayant eu une Syringomyélie. De même, les femmes belges ont plus en commun, physiquement, avec d’autres femmes, tous pays confondus, qu’avec les hommes belges; les personnes âgées elles présentent des caractéristiques communes à toutes les personnes âgées du monde. Bref, je pense que vous avez compris où je veux en venir… L’humanité est faite de divers groupes, et ces différences sont enrichissantes, si on fait le choix de les voir comme une richesse.

Je pense que les médias ont un rôle important dans les changements dans nos sociétés. J’ai été surprise de voir à quel point les médias anglais veillent à représenter réellement ce de quoi est formé la population d’Angleterre. Dans les rues de Londres, j’étais libre et aussi banale que celles qui les traversaient sur leurs deux jambes. A Bruxelles, je suis extraordinaire malgré-moi, sans qu’on ne me connaisse. Je préfère être libre et banale…

Nous sommes trop nombreux(ses) à savoir ce que c’est que d’être extraordinaires malgré-nous et enfermé(e)s malgré tout, à cause du manque d’accessibilité de nos lieux publics. Soyons visibles et audibles, avec ou sans déficiences pour rendre nos villes accessibles.

Prenez soin de vous, comme d’habitude, et de ceux que vous aimez,

Petit Cyborg